Jusqu’au 15 février 2010, se tient à l’hôtel de Soubise une exposition comme les Archives nationales savent nous en proposer : esthétique et pédagogique.
La Révolution marque la réorganisation de fond en comble de notre système judiciaire. Mais entre la suppression des anciennes juridictions et la mise en place des nouvelles instances une parenthèse s’intercale : temps de débats, de tâtonnements, d’ajustements. Pourtant - et c’est remarquable -, les justiciables n’en souffriront pas (façon de parler, ils auraient peut-être préféré qu’on les oublie) et des tribunaux provisoires assureront la continuité de la justice. Les procès en cours, ouverts avant la Révolution seront traités, les nouvelles affaires seront instruites. C’est cette étroite période (1790-1792) que met sous nos yeux la très belle exposition "La Révolution à la poursuite du crime".
Ce champ, concentré dans le temps, se limite au domaine pénal pour des raisons archivistiques que je vous laisse découvrir. Il nous permet en tout cas de comprendre qu’effervescence n’est pas licence. Que si Paris s’enthousiasme pour les idées nouvelles, l’ordre public ne doit pas en souffrir. La délinquance n’a pas sa place dans un monde nouveau forcément vertueux.
De cette phase transitoire, si l’élection des juges, copiée sur la jeune Amérique, n’a pas fait école, procédure accusatoire et qualification des infractions restent des pierres angulaires de notre code pénal.
Au fil d’une scénographie à la fois élégante et didactique vous découvrirez des détails de procédure du fameux vol du Garde-Meuble, vous comprendrez que très logiquement il y a continuité du personnel de la justice (témoin cette huile sur toile où l’on voit le juge Lecoq dans son nouvel habit noir, ayant remisé toge rouge, hermine et mortier au placard), vous verrez surtout qu’un document d’archive peut être un objet. Ces pièces à conviction : gouges, cordelettes, fioles, ne sont pas des objets de musée, ce sont des archives. Et ce qui m’a laissé songeur c’est cette vitrine, remplie de portefeuilles, en maroquin ou en toile, dérobés par des pickpockets, jamais restitués à leurs propriétaires. Plus d’argent, mais dépassent des papiers : extraits d’acte de baptême, quittance, lettre d’amour… Amis généalogistes je suis sûr que vous me comprenez.
Complétez ou préparez votre visite en consultant sur le site Internet des Archives nationales l’état général des fonds (sous-série Z/3 Tribunal criminel des Dix et Tribunaux criminels provisoires) et surtout l’inventaire revu et complété par Danis Habib dont l’index alphabétique est remarquable.
Un dernier mot. Si comme moi vous êtes passionné d’histoire sans dédaigner pour autant l’œnologie, allez à la Malmaison visiter l’exposition « La cave de Joséphine – Le vin sous l’Empire à Malmaison ». Prenant comme point d’appui l’inventaire après décès de l’Impératrice, cette exposition piquera votre curiosité au-delà des vénérables crus, depuis les usages de la table jusqu’à la cristallerie.
Jérôme Malhache.
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