La démarche est plutôt rare et souligne une situation assez tendue. La directrice des Archives nationales du monde du travail a pris elle-même la plume pour dénoncer un non-renouvellement de six postes de fonctionnaires sur le site de Roubaix, ville où est installé son service depuis quinze ans. Dans un communiqué diffusé ce jeudi, Françoise Bosman annonce en conséquence l'arrêt de la collecte des archives économiques et sociales :
Venant d’apprendre que 6 postes de fonctionnaires, portés dans les avis de vacance du ministère de la Culture depuis 3 ans pour certains et pour lesquels le service est pris d’assaut par des candidatures d’administrations voisines à corps et grades équivalents (répétons que les Ch’tis aiment leur Nord-Pas-de-Calais) ne seront pas pourvus malgré les candidatures retenues par le service et proposées au ministère à Paris, la direction du service décide de fermer la collecte des archives, ne pouvant faire face avec 18 présents (dont 2 scientifiques pour collecter sur l’ensemble du territoire national).
Malgré le succès du film de Dany Boon, rares sont les candidats (au sein du ministère) à un déménagement dans le Nord. De plus, les détachements entre administrations locales ne font pas partie de la politique maison, à l'heure où le ministère de la Culture s'engage dans une mutation et donc une redistribution des postes.
Il est vrai que le contexte n'est pas favorable : il y a d'abord la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, édictée par Nicolas Sarkozy à son arrivée à l'Elysée. Il y a surtout la réforme du ministère de la Culture (dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques), avec la création d'une direction générale des Patrimoines regroupant l’architecture, les archives, les musées, ainsi que le patrimoine monumental et l’archéologie.
Il y a enfin l'ouverture d'un nouveau bâtiment d'Archives à Pierrefitte-sur-Seine (93) à l'horizon 2011, qui bénéficie déjà de la création de 60 postes... au risque de léser les deux entités provinciales des Archives nationales, celle d'outre-mer à Aix-en-Provence et celle de Roubaix. Dès leur naissance, les Archives nationales du monde du travail ont connu un parcours chaotique, comme le soulignait La Revue française de Généalogie il y a un an dans un article consacré à ce service :
Françoise Bosman revient l'histoire de l'établissement : "L'idée de Jack Lang et de Pierre Mauroy (en 1983) était alors de créer un maillage de cinq grands sites pour que les fonds économiques et sociaux soient sauvés, là où les activités avaient eu lieu." Résultat, près de vingt-cinq ans plus tard, seul le site de Roubaix a vu le jour. "Cela doit rester une vision d'avenir, souligne la directrice. Il faut jouer la proximité : il faut rapprocher les archives des descendants des populations qui les ont sécrétées."
En attendant un déblocage de la situation, Françoise Bosman compte se concentrer sur l'accueil du public et sur le classement des documents déjà stockés. Les responsables des Archives de France regrettent ce "mouvement d'humeur" et assurent que des négociations sont en cours, avec la volonté de "se battre pour Roubaix".
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